La stèle est érigée en lisière du bois où se tint le combat du lieu-dit « Bois-Blanc », le 3 juillet 1944. Il s’agit d’une stèle sculptée en bas-relief dans un bloc de calcaire. On peut y lire, gravé le long d’un arc de cercle qui épouse la forme supérieure de la stèle : « Passant souviens-toi de ceux qui ont tout sacrifié », et sur la partie inférieure « pour ta liberté ». La stèle représente, de façon stylisée, un maquisard visant une cible, le fusil appuyé sur un rebord défensif. Pour être générique et symbolique, cette figuration n’en correspond pas moins à la réalité de la situation défensive des maquisards attaqués le 3 juillet 1944. Une croix de Lorraine s’ajoute à cette représentation.
Sur le socle de la stèle, composée d’un autre matériau, on peut lire les noms des quatre maquisards (Antoine Bielski, Felix Gallot, Robert Darras, Henri Thomassin), et de l’infirmière Marie-Louise, dite Léna Golmann, tués dans le combat [Voir l’album photo lié]. Marius Berlot (en réalité Berlaud) ne fut pas tué sur place, mais fait prisonnier le 4 juillet et fusillé au champ de tir d’Egriselles-Venoy, près d’Auxerre, le 22 août 1944.
Cette stèle a été financée par un groupe de résistants, à l’initiative de MM. Escallier, Bonneville et Pouyaud, et inaugurée le 31 août 1947.
Cette stèle n’est pas le seul élément commémoratif dont dispose la commune d’Andryes. À proximité, à l’emplacement où fut retrouvé son corps, une plaque à la mémoire de Marie-Louise Golmann (Léna) est fixée sur un bloc de calcaire, au-dessus duquel est représentée une croix de Lorraine.
À l’intérieur de la mairie d’Andryes est posée une plaque « À la mémoire des résistants tombés dans la lutte contre le nazisme pour la Liberté et la France », sur le territoire de la commune, ou originaires d’Andryes. On peut y lire les noms des maquisards tués au combat du « Bois-Blanc », le 3 juillet 1944 (dont l’infirmière) ; ceux des morts au combat du Bois de Druyes, le 26 juillet 1944 ; celui d’un résistant tué en mission le 11 juillet 1944 ; et celui du garde-chasse victime de la répression le 20 juillet 1944. Cette plaque fut financée par l’Amicale des anciens Résistants, à l’initiative de Pierre Lelu et de l’ANACR, et inaugurée le 29 septembre 1984.
Auteurs : Claude Delasselle et Joël Drogland
Sources :
CD-Rrom La Résistance dans l’Yonne, AERI – ARORY, 2004.
C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.
Contexte historique
Le 22 juin 1944, le Maquis 3 du Service national maquis s’installe au camp dit « du Bois-Blanc », à huit kilomètres à l’ouest de Coulanges-sur-Yonne, près du village de Fontenailles, sur la commune d’Andryes. Ce camp, qui a déjà été occupé par d’autres groupes de maquisards, est situé tout près de la limite Yonne-Nièvre, en bordure ouest de la forêt de Fretoy, ce qui permet un repli facile en cas d’attaque.
Le Maquis 3 compte alors environ 120 hommes. Un regroupement aussi important pose de sérieux problèmes de ravitaillement et les allées et venues des camions dans la région ne peuvent manquer d’attirer l’attention. Conscients du danger et conseillés par les responsables du Service national maquis, venus inspecter le camp, les maquisards ont aménagé des fossés et des trous d’abri en lisière de la forêt. Ils ont aussi aménagé un sentier de repli en direction de la RN 77, au nord-est ; de là, un autre sentier mène au hameau dit « des Champs-Gras », sur la commune de Mailly-le-Château. Le Maquis 3 dispose d’un armement important grâce aux nombreux parachutages obtenus depuis la fin mai : un mortier, deux bazookas, 17 fusils-mitrailleurs, de nombreux fusils, des mitraillettes. Une partie des hommes a été chaussée et habillée avec des tenues canadiennes parachutées depuis peu. Un autre parachutage est d’ailleurs prévu pour le soir du 3 juillet, près d’Etais-la-Sauvin.
Ce même jour, vers 17 heures, une jeune fille de Fontenailles arrive en hâte et signale qu’elle a vu de nombreux camions et autocars remplis de soldats arriver à Fontenailles. Aussitôt, les maquisards se préparent au combat. Peu après, les troupes allemandes arrivent en vue du camp et se déploient face à la forêt. Une colonne remonte l’allée forestière où sont garés les camions du maquis et les inspecte prudemment. Un autre groupe avance face à la lisière du bois où sont postés les maquisards, en se dissimulant dans un champ de blé. Les maquisards attendent en silence le signal pour tirer. Lorsque les Allemands arrivent à quelques dizaines de mètres d’eux, Félix Gallot, placé près des camions, commence à tirer avec son FM et tous les maquisards déclenchent alors le feu. Les assaillants ripostent puis reculent en désordre, laissant de nombreux morts et blessés derrière eux. Les Allemands obligent alors le fermier Chollet à atteler ses chevaux pour amener un mortier et une mitrailleuse lourde. Le mortier tire trop long, derrière les positions des maquisards, sans faire de dégâts. En revanche, la mitrailleuse lourde tire sans arrêt, hachant les feuillages juste au-dessus de la tête des maquisards allongés. Un tir de bazooka réussit heureusement à détruire la mitrailleuse.
Le combat continue, avec plus ou moins d’intensité, pendant plusieurs heures. Félix Gallot et Robert Darras ont été tués, et quelques hommes ont été blessés. André Cagnat, le chef du maquis, et son adjoint Raymond Thomasset décident alors le repli. Après s’être regroupés près du hameau dit « des Laurents » et avoir franchi avec précaution la RN 77 entre Coulanges et Courson, les maquisards continuent leur marche pendant la nuit et arrivent le lendemain en ordre dispersé au hameau des « Champs-Gras ». À l’aube, lorsque les Allemands donnent l’assaut sur le camp, celui-ci est vide. Mais un groupe d’une dizaine de jeunes de Clamecy, qui devait monter ce jour-là au camp, arrive à proximité sans savoir ce qui s’y est passé : deux d’entre eux, Antoine Bielski et Henri Thomassin, sont capturés et fusillés, deux autres sont blessés mais arrivent à s’enfuir.
Cet engagement du « Bois-Blanc » est le combat le plus important qui ait eu lieu dans l’Yonne : les 120 hommes du Maquis 3, bien équipés, encadrés et disciplinés ont tenu tête pendant plusieurs heures à une troupe allemande estimée, avec les renforts, à plus de 1 000 hommes. Les Allemands ont subi de lourdes pertes : des témoins ont compté 52 cercueils devant la mairie de Courson et de nombreux blessés ont été transportés dans les hôpitaux de la région. Les maquisards déplorent la mort de quatre hommes et celle de la jeune infirmière arrivée depuis peu au camp, Marie-Louise Golmann (Léna), dont on retrouvera le cadavre à quelque distance du camp et dont on suppose qu’elle s’est empoisonnée par peur de tomber vivante aux mains des Allemands. Le colonel allemand qui commandait l’attaque ayant interdit les représailles contre les populations des environs, on suppose qu’il a cru avoir eu affaire à un groupe de soldats alliés parachutés, et non à des résistants.
Auteurs : Claude Delasselle et Joël Drogland
Sources :
CD-Rom La Résistance dans l’Yonne, AERI – ARORY, 2004.
C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.